Nom des dieux. Nerveuse, Diane tritura son dé
dans sa poche. Elle voyageait toute pomponnée dans une calèche de rupins. Avec
à ses côtés une dame magnifique dans une robe de bal, qui sentait le jasmin et
la regardait avec tendresse…
Mince. C’était mieux que de castagner un gros dur
pour une miche de pain…
Les maisons défilaient, puis l’attelage franchit la
Stral, l’un des deux fleuves et accéda au quartier de la Citadelle, fermé par
des barrières et des tas de gardes. Le capitaine donna un papier et un type en
uniforme vint regarder à l’intérieur. Diane lui tira la langue et il recula,
haussant le sourcil autant que les épaules, et leur fit signe de passer.
Au milieu des jardins et des palais, peu à
peu éclairés de lampes à huile de baleine ou de brûlots, la gamine rousse
écarquilla les yeux.
Le groupe s’arrêta devant un jardin qui annonçait un
immeuble de pierre de trois étages, étrangement peint en jaune, surmonté d’un
drapeau figurant une sorte de poisson à corne.
-L’ambassade de Narval, expliqua la belle
dame.
Narval, elle
savait juste que c’était une ville du nord qui vendait des choses précieuses,
genre de l’ivoire ou des métaux. Des trucs de riches quoi.
Devant le bâtiment, le parc était peuplé de véhicules
luxueux. Des hommes s’occupaient des chevaux, mais ils ne ressemblaient en rien
aux palefreniers de la ville basse. Ceux-ci avaient des redingotes, pas des
vestes trouées ou mangées aux mites. Ils ne crachaient pas leur tabac par
terre, mais faisaient la révérence. Ils portaient une putain de perruque poudrée
! Diane retint un éclat de rire devant tant de ridicule.
Le capitaine et la belle dame franchirent une grille de métal
ouvragée qui révéla un jardin jalonné d’arbres taillés en formes d’animaux. L’écuelle
de ragoût était déjà loin. L’estomac dans les talons et les jambes alourdies
par les lieues avalées tout au long de la journée, la messagère ne quitta pas d’un
pouce les deux adultes. Les tenues des gens ! Des robes à volants, à dentelles,
des bijoux brillants qui devaient valoir plusieurs vies. Un autre monde.
Des femmes patientaient à la porte
avec le plus gros registre qu’elle ait jamais vu. Elles cherchèrent les noms
des invités et la belle dame - Dorotéa - négocia l’entrée de la gamine. “C’est
notre fille”, expliqua-t-elle.
Le cœur de Diane ne fit qu’un bond.
Leur fille ? Elle ne l’avait jamais vue avant aujourd’hui…
Mais ce serait vachement bien d’avoir une mère
aussi belle.
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